Bulle-pensée égorgée
« Le pâle hortensia s’unie au myrte vert ! »
Nerval
Egorgeoir à malaise…
Je suis une arrière-pensée, dans ta gorge, coincée. Je suis un arrière-pays qui partout te suit. Je suis ton unique amie, ton amant fidèle, la sœur jumelle que tu n’as jamais eue et qui te retiens quand tu vacilles. Je suis là, constamment logé dans un coin de ta tête, moi, ta plus belle fantaisie. Je me fais chimère et menteuse quand tu as besoin d’ailes inventées ou de plomb meurtrier ; je ris et pleure quand ton visage rigide reste lisse. Je suis un mensonge plus vrai que ta vie stérile, un grand château d’angéliques solitudes plus vaste que l’intemporel et un vertige de musique sous la lune idéale plus bruyant que le sifflement des armes, lorsque le coup part et qu’éclate la balle ; une araignée aussi, qui file et entortille le fil impalpable qui te raccroche, pantin, à la sève des rêves. Je suis ton double et ton reflet, ton moi immaculé. Je suis la puissance des idées mystiques et oniriques qui coulent dans tes veines. Je suis le myrte incandescent qui tapisse de blanches allégories le fond triste et malheureux de ton néant. Je suis l’hortensia efflorescent qui allume de mots inavoués l’intérieur fermé de ton plumier. Je suis ton égorgeoir à malaise...